Bail à loyer et défaut: les premières questions et réflexes à avoir

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Bail à loyer et défaut: les premières questions et réflexes à avoir

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Lorsque le locataire subit une perte de jouissance de l’objet loué, il dispose de divers droits tels que la résiliation du bail pour justes motifs, la réfection du défaut aux frais du bailleur, la réparation du dommage subi en raison du défaut (dommages-intérêts), la consignation du loyer et sa réduction.

En pratique, le locataire avisera son bailleur de la présence d’un défaut de moindre importance et ce dernier, tantôt entreprendra les réparations nécessaires, tantôt s’y refusera en indiquant ses motifs ou, cas plus désagréable, restera passif. C’est dans ces deux derniers cas que le locataire envisagera de faire valoir ses droits.

Suivant la gravité du défaut, le locataire considérera avoir droit, à jouissance amoindrie, à payer un loyer amoindri.

Toutefois, avant d’agir en justice ou, pour le bailleur, de donner réponse au locataire, il s’agit de se demander si l’on est en présence d’un défaut, question qui peut paraître bien plus complexe qu’elle en a l’air.

Ce que l’on appelle « défaut »

Un bien est entaché d’un défaut lorsque sa qualité réelle n’est pas conforme à la qualité promise, à savoir les qualités découlant du contrat de bail ou de l’annonce à laquelle le locataire aura répondu, ou des qualités attendues selon le principe de la confiance, l’usage ou les normes usuelles. Le prix du loyer et l’âge de l’immeuble sont aussi à prendre en considération pour la détermination des qualités attendues.

Ainsi, un appartement salubre et dans lequel l’on peut vivre peut être entaché de défauts. Voici quelques exemples :

  • immissions (bruits excessifs, odeurs désagréables, ombre ou source de lumière excessifs) ;
  • panne d’une installation (buanderie, installations d’eau, agencement de cuisine, interphone ou ascenseur, éventuelle climatisation ou cheminée) ;
  • moisissures ;
  • courants d’air ;
  • chauffage insuffisant (en dessous de 18 °C l’hiver) ;
  • mur ou sol en trop mauvais état ;
  • présence d’un salon de massage dans l’immeuble ;
  • stores défectueux.

Naturellement, la liste pourrait être encore très longue et une appréciation au cas par cas est nécessaire.

Il est à noter que l’existence d’un défaut est indépendante de la faute du bailleur. Ainsi, les nuisances découlant de tiers, par exemple de travaux dans le voisinage ou de voisins bruyant permet d’agir contre le bailleur.

 

Comment déterminer la qualité promise

En premier lieu, il faut retenir que le contenu du contrat est l’élément primordial pour déterminer les qualités promises. Dans la pratique, celui-ci est souvent rédigé en termes standard, de sorte que l’on est souvent amené à se référer à d’autres éléments tel que l’annonce dont il est conseillé de toujours garder un exemplaire.

Lorsque la qualité promise ne ressort pas clairement du contrat, il s’agit de l’interpréter ou d’en compléter le silence, ce qui suppose une appréciation au cas par cas. La question qui se poser alors est généralement de savoir ce à quoi le locataire était en droit de s’attendre conformément au principe de la bonne foi (principe de confiance).

Il est à noter que si les clauses du contrat ne sont pas claires, l’interprétation se fait souvent en défaveur du bailleur dans la mesure où il est généralement l’auteur du contrat, d’autant plus qu’il est réputé être la partie forte dans la relation contractuelle.

Le comportement du locataire lors de la remise de la chose

Le comportement du locataire lors de la remise de la chose peut revêtir une grande importance dans l’interprétation ou le complètement du contrat.

Ainsi, lorsque le locataire reçoit la chose dans un état par rapport auquel il reste passif, l’on peut inférer à son comportement que la chose remise était conforme au contrat.

Par exemple, un appartement équipé d’une cheminée de salon dans laquelle il n’est pas possible de faire du feu n’est pas entaché d’un défaut si le locataire en a été averti  lors de la conclusion du contrat. Naturellement, il en irait autrement si le contrat ou l’annonce précisait que l’appartement était muni d’une cheminée de salon (le locataire pourrait alors en déduire de toute bonne foi que cette cheminée serait fonctionnelle).

Cela étant dit, il convient de rappeler que la passivité du locataire n’est qu’un moyen d’interprétation du contrat et non qu’elle n’a donc pas pour effet de le déchoir systématiquement de son droit à invoquer un défaut qu’il aurait constaté ou dû constater.

En effet, la loi ne prévoit pas d’obligation de vérification et d’avis immédiat des défauts sanctionnés par une déchéance des droits comme cela existe en matière de contrat de vente.

Par ailleurs, le bailleur est toujours censé garantir un standard minimum auquel le locataire ne saurait renoncer valablement par son simple comportement. Il en va ainsi de tout ce qui est nécessaire à l’usage normal de la chose louée.

L’on retiendra aussi que le locataire soucieux de préserver ses droits, ferait bien de protester lors de l’état des lieux ou après la remise des locaux s’il relève des points susceptibles de constituer des défauts.

Pour sa part, le bailleur proposant un appartement au standard inférieur aura tout intérêt à en faire mention dans le contrat de bail, en particulier si certaines installations ne fonctionnent pas et qu’il n’entend pas les remettre en état au cours du bail. Le prix du loyer devrait être adapté en conséquence vu l’interdiction du rendement excessif.

S’agit-il de menu défauts dont la réfection est à la charge du locataire ?

Le locataire doit remédier à ses frais aux défauts qui peuvent être éliminés par les menus travaux de nettoyage ou de réparation indispensables à l’entretien normal de la chose (art. 259 CO).

Il en va ainsi des changements de plombs ou d’ampoules, du filtre de la hotte d’aspiration, du nettoyage des siphons ou du changement d’une pomme de douche.

Une partie de la doctrine fixe une limite des menus travaux à CHF 150.00. Cette limite, critiquée, ne constitue certainement pas une règle absolue : il s’agit aussi de se poser la question si des aptitudes particulières sur le plan technique sont exigées et d’apprécier les travaux à faire selon les circonstances. Ainsi, le changement d’un cache de prise ou la pose d’un joint de silicone sur une installation sanitaire peut être d’un prix inférieur à CHF 150.00, mais n’est pas à la portée du locataire moyen.

Le locataire est-il à l’origine des défauts ?

Le locataire est également tenu de (faire) réparer à ses frais les dégâts occasionnés par lui-même ou ses proches (à ce titre, il fera, généralement, intervenir son assurance RC dont la conclusion est très souvent imposée par les bailleurs).

Cette solution semble évidente lorsque le locataire brise accidentellement (ou non) une vitre de son logement.

Il est toutefois de nombreux cas où le locataire s’inscrit dans la chaine causale de survenue du défaut, mais n’en répond pas.

Il peut en aller ainsi si un lavabo, déjà bien fendu, se casse suite à la chute d’un petit objet. Si la chute de l’objet est l’élément déclencheur, le dommage peut être inféré, pour sa part, dû à la fragilité structurelle du lavabo.

Plus classique est la sempiternelle tentative de certains bailleurs de mettre à la charge du locataire la repeinte des murs ou changement de tapisserie pourtant amortie eu égard à sa « durée de vie » normale, notamment en prétextant un jaunissement dû à la fumée de cigarette même si le locataire affirme ne pas fumer à l’intérieur ou ne le faire qu’à la fenêtre (se référer à ce propos au Tableau paritaire des amortissements commune aux associations de bailleurs et de locataires )

Avis des défauts 

En présence d’un défaut auquel le locataire n’est pas tenu de remédier lui-même (voir supra), celui-ci doit en aviser le bailleur.

Ce devoir d’avis peut exister déjà avant la survenance du défaut lorsque le locataire peut constater qu’un dégât risque de se produire. Par exemple : s’il constate un trou dans le toit, il ne doit pas attendre que les infiltrations d’eau ne se produisent. En pareil cas, l’avis des défauts est particulièrement important pour le locataire s’il veut éviter que des dommages-intérêts lui soient réclamés (art. 257g al. 2 CO).

La communication d’un défaut au concierge est réputé faite valablement auprès du bailleur eu égard à sa qualité d’auxiliaire de ce dernier (art. 101 CO).

L’avis des défauts est indispensable pour pouvoir réclamer une réduction de loyer pour ce motif, sauf si le bailleur en connaissait déjà l’existence (art. 259d CO).

Pour peu que l’avis des défauts se fasse sous la forme écrite où le locataire impartit un délai raisonnable au bailleur pour mettre fin au défaut en question et menace de faire, à défaut, consigner les loyers futurs, il peut aussi permettre une telle consignation en cas d’inexécution du bailleur dans le délai imparti.

L’avis des défauts est également indispensable à la résiliation du bail pour justes motifs par le locataire ou pour que ce dernier fasse procéder, lui-même, aux réfections aux frais du bailleur.

S’il peut, en pratique, paraître disproportionné d’écrire un courrier recommandé pour une simple réparation de cuisinière (en tout cas dans un premier temps et en présence d’une gérance correcte) il faut garder à l’esprit qu’il appartient au locataire agissant en justice de prouver les faits à l’appui de ses prétentions (art. 8  CC).

Il doit donc prouver que l’avis des défauts a été donné et, suivant ce qu’il envisage de faire par la suite, qu’un délai convenable a été imparti au bailleur et, cas échéant, que la menace de consignation a été formulée par écrit. Cette forme permet aussi de s’assurer que le locataire ait avisé le bailleur à temps d’une situation susceptible de se dégrader ultérieurement et, donc, qu’il ne puisse pas être tenu pour responsable des dommages ultérieurs.

Dans le doute, la prudence commanderait donc de signaler les défauts par courrier recommandé.

Suivant le montant en jeu – en particulier lorsqu’une réduction de loyer substantielle est à envisager sur une longue période – l’intervention ou les conseils d’un avocat peuvent permettre d’éviter de commettre des erreurs souvent difficiles à réparer par la suite.

By | 2018-02-14T13:01:13+01:00 février 14th, 2018|Uncategorized|0 Comments

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